Pendant quatre jours je t’ai raconté des trucs sur le travail, les
lois Auroux, les trente-huit heures…
Alors mes mains, dans tout ça, qu’est-ce qu’elles deviennent, mes mains ? On dit : « Bon, en 1974, il avait mal aux mains. Maintenant ça a l’air de passer. Il est devenu beaucoup plus intellectuel, il n’a plus mal aux mains, il a mal à la tête… » Il est fou, quoi. Seulement, moi, je travaille encore avec mes mains ! Et ça, ça me fait toujours mal. Mais maintenant je me tais. Parce que, pendant dix ans, tu en souffres tout seul. Et en même temps, tu as l’impression d’être une espèce de cobaye… aussi bien de la part des copains… qui veulent surtout pas écrire ce genre de truc avec moi, alors qu’en fait, à mon avis, leur boulot de militant – c’est à eux que je devrais le dire –, ça aurait été de faire ce livre avec moi.
Seulement ça, je vais te le dire,
ça crée un déséquilibre complet, parce qu’une semaine comme ça, c’est
pas facile de la vivre quand tu travailles en chaîne et que t’as en plus
plein de boulot syndical à faire. C’est pas facile. Alors mes mains, dans tout ça, qu’est-ce qu’elles deviennent, mes mains ? On dit : « Bon, en 1974, il avait mal aux mains. Maintenant ça a l’air de passer. Il est devenu beaucoup plus intellectuel, il n’a plus mal aux mains, il a mal à la tête… » Il est fou, quoi. Seulement, moi, je travaille encore avec mes mains ! Et ça, ça me fait toujours mal. Mais maintenant je me tais. Parce que, pendant dix ans, tu en souffres tout seul. Et en même temps, tu as l’impression d’être une espèce de cobaye… aussi bien de la part des copains… qui veulent surtout pas écrire ce genre de truc avec moi, alors qu’en fait, à mon avis, leur boulot de militant – c’est à eux que je devrais le dire –, ça aurait été de faire ce livre avec moi.
Au début des années 1980, le sociologue Michel Pialoux rencontre
Christian Corouge, ouvrier et syndicaliste chez Peugeot-Sochaux. Ils
entament un long dialogue sur le travail à la chaîne, l’entraide dans
les ateliers et la vie quotidienne des familles ouvrières. À partir de
l’histoire singulière d’un ouvrier, devenu porte-parole de son atelier
sans jamais le quitter, sont abordées les difficultés de la constitution
d’une résistance syndicale.
> Lire un entretien avec Christian Corouge sur le blog des éditions Agone: « Je suis toujours resté à l’usine ».
Christian Corouge - Michel Pialoux
Résister à la chaîne
464 pages
(12 x 21 cm)
23.00 €