samedi 18 juillet 2015

La production industrielle des biens culturels


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Selon le livre, le monde entier est structuré par l’industrie culturelle (la culture de masse), laquelle est un système formé par le film, la radio, la presse écrite. L'industrie culturelle tend non pas à l’émancipation ou à la libération de l’individu, mais au contraire à une uniformisation de ses modes de vie et à la domination d’une logique économique et d’un pouvoir autoritaire. Le phénomène ne concerne pas seulement les pays totalitaires, mais également les autres pays, à commencer par les sociétés libérales.
Il y a une unité de la civilisation de masse, qui est dirigée d'en haut par un pouvoir économique qui dépasse celui de l’industrie culturelle et exerce sur elle son emprise. Il n’y a pas de différence de nature entre la propagande et l’industrie culturelle : la technique est la même. Le consommateur est considéré seulement comme client et comme employé, soit comme matériel statistique (comme un moyen et non comme une fin).

La « culture » propagée par l’industrie culturelle n’est pas quelque chose d’extérieur à l’existence de l’individu. Elle semble concerner uniquement ce qui relève du loisir ou du divertissement, mais c’est là qu’elle exerce en réalité son emprise la plus forte. On croit échapper dans le divertissement au processus de travail, mais en réalité, c’est dans le divertissement que l'individu est préparé et discipliné par l'industrie culturelle pour l’affronter. Les carrières des professions libérales sont déterminées par l’appartenance à la "culture" plus encore que par les savoirs techniques, car c’est dans la "culture" que se manifeste l’allégeance au pouvoir et à la hiérarchie sociale. S’amuser, c’est donc être en accord avec la société.
Le système de l’industrie culturelle marginalise, au contraire, ceux qui refusent cette uniformisation. Le pauvre est l’exclu par excellence du système. Bien que l’art se trouve également en dehors du système a priori, il n’échappe pas en fait à la logique de l’industrie culturelle, et se reconnaît même en elle comme un objet de consommation. En réalité, les individus sont imprégnés jusque dans leur langage, dans leurs gestes, dans leurs émotions les plus intimes par le pouvoir de l’industrie culturelle. Les consommateurs sont contraints de devenir non des sujets mais des produits.


Kulturindustrie, Theodor Wiesengrund Adorno, Max Horkheimer Nouvelles dictatures européennes et Seconde Guerre mondiale Désillusions et désengagements (1947-1951)

 Il est une chose à propos de laquelle, il est vrai, l’idéologie creuse ne badine pas : la sécurité sociale. 'Nul ne doit avoir faim ou froid ; tout contrevenant ira au camp de concentration' : cette plaisanterie qui vient de l’Allemagne d’Hitler pourrait servir d’enseigne à toutes les entrées d’établissements de l’industrie culturelle. Traduit de l'allemand par Eliane Kaufholz.


janvier 2012 - prix: 6,20 €
format : 10 x 17 mm
112 pages
ISBN: 978-2-84485-436-0