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| Force anti-Ouvrière : des militants d'un parti post-trotskiste mafieux - Paris | 
La 
bureaucratisation et la délégation du pouvoir demeurent les dérives les 
plus importantes des mouvements sociaux. Le numéro 56 de la revue Agone est consacré aux porte-parole, militants et mobilisations. « La
 confiscation des protestations populaires et le détournement des luttes
 par les appareils militants sont des risques inhérents aux 
mobilisations collectives », présentent Baptiste Giraud, Julian Mischi et Etienne Pénissat. Des débuts du mouvement ouvrier jusqu’aux insurrections récentes du Printemps arabe, les luttes sociales s’embourbent souvent dans la bureaucratisation.
La 
réflexion sur la délégation de pouvoir dans les mouvements sociaux peut 
se nourrir de la sociologie américaine. Les leaders des mobilisations 
populaires deviennent des professionnels de la lutte qui modèrent la 
radicalité des exploités contre l’ordre social. « L’institutionnalisation des mobilisation se réalise au prix d’une domestication de leur charge révolutionnaire »,
 résument les trois universitaires. Roberto Michels dénonce une 
« tendance à l’oligarchie » dans les organisations du mouvement ouvrier.
 Les partis révolutionnaires se muent en simples organes d’opposition 
parlementaire pour permettre à ses dirigeants de défendre leurs intérêts
 spécifiques et leurs positions de pouvoir. En revanche, les actions 
contestataires peuvent se coordonner « à la base » et rester sous le 
contrôle des classes populaires.
Les
 dirigeants syndicaux, comme ceux de la CGT, deviennent une élite 
militante qui exerce des activités institutionnelles de porte-parole et 
accèdent à des conditions de vie et milieux sociaux largement 
déconnectés des classes populaires. La distance ne cesse de se creuser 
entre les dirigeants syndicaux et les travailleurs. L’éloignement social
 s’observe à travers les styles de vie et types de fréquentation.
L’institutionnalisation
 des syndicats permet de s’organiser de manière légale dans l’entreprise
 et peut fournir des outils pour construire des rapports de force, mais 
favorise aussi leur domestication. Les mouvements sociaux doivent 
conserver leur autonomie face aux classes dominantes.
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| Les cégétistes répriment des radicaux - Marseille | 
Spontanéité et encadrement des luttes
Les sociologues Richard A. Cloward et Frances Fox Piven
 analysent différentes mobilisations qui se déroulent aux États-Unis, 
notamment les mouvements de chômeurs des années 1930 et les luttes des 
noirs pour les droits civiques dans les années 1960. L’organisation du 
mouvement vide les protestations populaires de leur force subversive. 
Les leaders structurent les mobilisations et se transforment en 
professionnels de la lutte. Ils font des compromis avec les autorités 
pour assurer leur position. La contestation spontanée est canalisée 
lorsqu’elle passe de la rue et des usines aux salles de réunions et aux 
salons institutionnels. La réussite de l’organisation débouche vers 
l’échec du mouvement.
Les moyens de coercition physique et les moyens de production des richesses sont contrôlés par une même classe dirigeante. Le système électoral représentatif
 vise à dissimuler cet accaparement du pouvoir. Pour les pauvres, la 
seule forme de protestation consiste à bafouer les normes politiques. Un
 changement sur le plan de la conscience et des comportements peut 
permettre l’émergence d’un mouvement de protestation. « Un grand 
nombre d’individus, qui d’ordinaire se plient à l’autorité de leurs 
gouvernants et reconnaissent la légitimité du cadre institutionnel, en 
viennent à penser que ces gouvernants et ce cadre sont injustes et 
mauvais », décrivent les deux sociologues. 
Les
 personnes d’ordinaire fatalistes exigent alors un changement en dehors 
du cadre existant. Les personnes qui se considèrent impuissantes 
prennent conscience de leur capacité d’agir et tente de prendre leur vie
 en main. Des grèves, des manifestations, des émeutes éclatent alors à 
grande échelle. « D’abord, les gens se rebellent en nombre ; ils se 
mettent à transgresser les traditions et les lois auxquelles ils se 
plient d’habitude, et ils défient les autorités devant lesquelles ils 
s’inclinent en temps normal », observent les deux universitaires. La lutte permet de sortir de l’acte individuel pour devenir un mouvement collectif.
Pourtant,
 la plupart des gens se conforment aux contraintes sociales dans leur 
vie quotidienne. Ils se plient aux règles et aux rythmes dictés pour 
gagner leur vie. L’environnement social est considéré comme juste et 
inévitable. Mais les pauvres peuvent aussi se révolter, briser les 
chaînes du conformisme dans lesquelles les enferment le travail, la 
famille et l’environnement social. Les classes populaires se révoltent, 
mais uniquement dans certaines circonstances exceptionnelles. La colère 
et la frustration, combinée avec une crise des institutions de contrôle 
social, peuvent déboucher vers des révoltes. C’est surtout lorsque la 
situation entraîne une rupture dans la vie quotidienne que des 
mouvements émergent. Le confort de la routine du travail ne permet plus 
de survivre. Seules des conditions exceptionnelles expliquent la 
révolte. Rosa Luxemburg estime que les organisations du mouvement ouvrier ne peuvent pas prévoir les explosions sociales.
La 
révolte explose lorsque la colère sort des normes politiques imposées 
par le système représentatif électoral. Les personnes qui se révoltent 
agissent par rapport à leur expérience quotidienne. Le patron, le 
contremaître, l’administration qui contrôle ou le propriétaire sont les 
cibles immédiates. Les classes dirigeantes, l’État et le capitalisme 
demeurent des ennemis plus abstraits et lointains. Les prolétaires 
luttent localement, et s’en prennent à de simples exécutants, plutôt que
 de s’attaquer à des administrations centrales à l’autre bout du pays. 
Lorsque les contestations locales se généralisent, le mouvement peut 
construire un rapport de force plus global.
Pour
 endiguer un mouvement d’ampleur, le pouvoir doit satisfaire les 
revendications. Les groupes qui refusent les concessions et veulent 
continuer la lutte peuvent alors être isolés et réprimés plus 
facilement. Les réformes débouchent également vers une 
institutionnalisation des luttes. Dans les années 1930, le droit de se 
syndiquer permet l’abandon de la grève sauvage au profit de pratiques 
légalistes et juridiques. Dans les années 1960, le droit de vote des 
noirs orientent les leaders du mouvement vers la normalisation 
politicienne et la bureaucratisation à travers la participation aux 
élections.
La 
protestation découle de changements sociaux. Elle n’est pas créée par 
ceux qui l’organise et en prennent les commandes. Les changements 
politiques découlent de la protestation de masse et des perturbations, 
et non pas des organisations.
Syndicalisme et bureaucratie locale
Baptiste Giraud
 évoque le rôle des syndicats dans les entreprises. Les organisations de
 salariés contribuent à impulser des conflits sociaux à travers leur 
militantisme. Mais les syndicats tentent également d’encadrer et de 
canaliser la révolte qui s’exprime. « S’ils facilitent par leur 
activisme militant l’entrée des salariés dans des actions 
protestataires, les syndicalistes contribuent également à canaliser les 
modalités d’expression du mécontentement », constate Baptiste 
Giraud. Les syndicalistes imposent des limites dans l’usage de la grève 
qui doit se conformer au cadre des revendications et à des formes 
légitimes. En 2008 et en 2010, la CGT refuse la stratégie de la grève 
générale et préfère des journées d’action espacées dans le temps. Les 
syndicats refusent un affrontement radical avec le gouvernement et le 
patronat pour conserver leur rôle de négociateurs privilégiés.
Une
 bureaucratisation des syndicats renforce l’importance des ressources 
institutionnelles et des négociations collectives pendant les luttes 
sociales. Le nombre de permanents et de professionnels du syndicalisme 
ne cesse d’augmenter. La conflictualité sociale diminue pour préserver 
l’accès aux ressources institutionnelles qui permettent le bon 
fonctionnement du syndicat. Une bureaucratie se forme également au 
niveau local, à l’échelle des entreprises. Les responsables du personnel
 n’ont souvent aucun ancrage militant. Mais les pratiques de négociation
 peuvent aussi se combiner avec l’usage de la grève.
L’exemple
 des syndicalistes CGT d’une entreprise de fabrication de champagne 
permet de montrer les mécanismes de canalisation de la lutte sociale. La
 CGT semble fortement implantée dans cette entreprise marquée par une 
longue histoire de révoltes ouvrières. Le syndicat n’a alors aucune 
difficulté pour mobiliser les salariés. Les militants cherchent « à 
entretenir leur fort pouvoir de mobilisation, tout en maintenant 
l’affrontement avec la direction dans des limites jugées raisonnables », observe Baptiste Giraud.
Les
 débrayages sont fréquents et permettent de défendre les intérêts des 
salariés. Mais les syndicalistes refusent de lancer un mouvement de 
grève pendant les vendanges. Ils s’identifient à l’entreprise et ne 
veulent pas la mettre en péril. « Le conflit, ça doit être un conflit raisonné. C’est ça le changement aussi. Il faut raisonner, modérer les esprits »,
 affirme un délégué du personnel. Il s’oppose au discours jugé trop 
politique des dirigeants CGT de sa branche, trop axé sur la lutte des 
classes à son goût. Il privilégie au contraire la négociation.
Les
 syndicalistes doivent être acceptés par les salariés comme des 
porte-parole légitimes, mais doivent également apparaître comme des 
interlocuteurs pour la direction et les pouvoirs publics. Pour cela, il 
faut montrer qu’ils encadrent la colère des salariés et la modère. Le 
délégué du personnel est même promu à la direction des ressources 
humaines. L’engagement syndical permet d’accéder à des positions 
professionnelles plus gratifiantes. La grève et le rapport de force ne 
sont plus considérés comme des préalables indispensables à la 
négociation.
Les femmes étouffées par la bureaucratie
Fanny Gallot
 observe la faible représentation des ouvrières dans les syndicats. Les 
femmes accèdent beaucoup moins à des fonctions de déléguées syndicales 
que les hommes. Les ouvrières mariées assurent l’essentiel des tâches 
domestiques. Le syndicat ne prend pas en compte ce problème. Ensuite, 
les femmes ne sont pas incitées à militer et à prendre la parole. Ce 
sont toujours les hommes qui monopolisent les postes à responsabilité.
Les
 formations doivent permettre de pallier le manque de confiance en elles
 ressentit par les ouvrières. Mais la formation généraliste demeure très
 genrée et s’appuie sur des ressources théoriques dont les hommes 
disposent davantage. Les ouvrières préfèrent s’exprimer directement sur 
les expériences qu’elles mènent dans leurs usines. Les hommes manient un
 jargon technique et les femmes ne se sentent pas à la hauteur. Les 
ouvrières privilégient les problèmes concrets de la vie quotidienne au 
langage abstrait. Le militantisme leur impose de s’éloigner de leur vécu
 pour se conformer à une idéologie.
Les
 ouvrières se sentent mal à l’aise dans les commissions féminines qui 
les mettent à l’écart. Elles se sentent enfermées dans un créneau 
spécifique et éloignées des préoccupations générales. Les ouvrières 
veulent être partie prenante de l’activité générale du syndicat plutôt 
que de parler de crèche et de vaisselles considérés comme étant des 
problèmes spécifiques aux femmes. Les ouvrières rejettent pour ces mêmes
 raisons les groupes non mixtes valorisés par le féminisme bourgeois. 
Les militants masculins restent imprégnés par la conception 
traditionnelle de la femme.
Les
 hommes encouragent les ouvrières à créer une « équipe de femmes » dans 
un attitude paternaliste. A travers une commission féminine, « l’investissement des ouvrières est canalisé, cloisonné, et ne risque pas de porter préjudice au fonctionnement masculin habituel », observe Fanny Gallot.
Les
 femmes qui veulent militer doivent se fondre dans le moule masculin. 
Elles doivent mettre en avant des revendications féminines, mais qui ne 
relèvent pas de la vie privée. Elles doivent reproduire les 
comportements masculins. Les syndicalistes hommes ne cessent de les 
renvoyer à leur identité de femme. Par exemple, le salaire des ouvrières
 est considéré comme un complément pour s’acheter du maquillage. Les 
femmes qui accèdent à des postes à responsabilité se heurtent à des 
discours décourageants et culpabilisants. Ces propos s’accompagnent 
d’une division sexuée du travail dans le syndicat où les femmes doivent 
se contenter de tâches ingrates et peu valorisantes. Les femmes 
préfèrent lutter dans leur usine plutôt que de rejoindre la bureaucratie
 syndicale.
Les immigrés face aux bureaucrates
Vincent Gay se penche sur les luttes des travailleurs immigrés. Dans les années 1968,
 de nombreux conflits sociaux sont menés par des immigrés. Ils ne 
disposent pas vraiment de soutien de la part des syndicats et 
s’organisent par eux-mêmes. « Les exigences d’autonomie et de 
contrôle des luttes par les premiers concernés butent contre les risques
 de confiscation des mobilisations collectives par les appareils 
syndicaux ou politiques », analyse Vincent Gay. Les immigrés rentrent dans les syndicats, ce qui crée des tensions avec les bureaucraties. 
Dans les années 1980, des luttes éclatent dans les usines Talbot et Citröen, en particulier à Aulnay-sous-bois.
 Les immigrés sont nombreux dans ces usines. Ils se heurtent au patronat
 et au syndicalisme indépendant qui collabore avec la direction. Les 
grévistes de 1982 revendiquent des augmentations de salaires, mais aussi
 le respect de leur dignité et des libertés syndicales. La CGT et la 
CFDT se heurtent à des violences et menaces de licenciement. Ils restent
 donc peu implantés. Mais après le mouvement de grève, les ouvriers 
rejoignent massivement les syndicats.
Les
 nouveaux syndicalistes sont des anciens grévistes qui n’ont aucune 
expérience militante. La fonction de délégué de chaîne apparaît. Ce type
 de représentation est institué par le groupe des ouvriers mais n’est 
pas reconnu par les instances représentatives du personnel. L’activité 
des délégués de chaîne se centre sur leur lieu de travail. Ils ne 
participent pas aux négociations avec la direction de l’entreprise.
Les
 patrons, les cadres et les contremaîtres perçoivent les délégués de 
chaîne comme un pouvoir ouvrier non institutionnel qui les menace. Les 
syndicalistes de la CGT dénoncent également leur contestation permanente
 et leur refus de se conformer aux consignes syndicales. Au contraire, 
la CGT doit « éteindre les incendies ». Les arrêts intempestifs de la 
chaîne et les grèves sauvages sont jugés incompatibles avec une 
véritable activité syndicale. La morale ouvrière s’attache au contraire à
 un respect du travail.
Les
 conflits au sein de la CGT recouvrent une opposition entre français et 
immigrés, mais surtout un clivage de classe entre les ouvriers 
spécialisés et les ouvriers qualifiés. La défense de l’emploi demeure 
centrale pour les syndicalistes. Au contraire, les ouvriers immigrés 
insistent sur les conditions de travail, les relations hiérarchiques et 
sur les libertés dans l’entreprise.
Dépasser le syndicalisme
Les analyses de la revue Agone
 ne visent pas à liquider toute forme de syndicalisme, mais tentent de 
mieux comprendre ses dérives. En période d’absence de contestation 
généralisée, le syndicalisme de base permet de défendre ses intérêts 
immédiats et ses conditions de vie. C’est sans doute la forme de 
militantisme la plus en prise avec les réalités du quotidien et la plus 
éloignée du folklore gauchiste inoffensif.
En 
revanche, lorsque des mouvements sociaux explosent, le cadre syndical 
doit impérativement être dépassé. Des formes d’organisation nouvelles se
 créent spontanément et les syndicats tentent de les encadrer ou de les 
étouffer. Les bureaucrates n’ont clairement pas intérêt à un changement 
radical de société car ils risquent alors de perdre leur petit pouvoir. 
Les syndicats sont d’ailleurs hostiles à toute forme de rupture 
révolutionnaire et paniquent dès qu’une lutte semble échapper à leur 
contrôle.
La revue Agone
 privilégie ici une approche sociologique, avec les classiques comme la 
« loi d’airain de l’oligarchie ». Cette analyse permet de comprendre la 
formation des bureaucraties et la création de véritables professionnels 
de la contestation. Mais une approche plus historique peut se pencher 
sur les grands mouvements de révolte passés et observer le rôle des 
syndicats. Pendant le mouvement de 1936 ou encore en Mai 68,
 les syndicalistes se rangent aux côtés du patronat et du gouvernement 
pour exiger des négociations. Ils appellent rapidement à la reprise du 
travail et à l’arrêt de la lutte.
Enfin,
 le syndicalisme semble attaché à une morale du travail. Même les 
anarcho-syndicalistes n’échappent pas à ce travers comme le montre l’insurrection dans l’Espagne de 1936-37.
 Le syndicat de remet pas en cause la centralité du travail et s’attache
 à un mode de production performant. Pour cette raison, le syndicalisme 
rejoint la routine militante
 qui sépare la lutte de la vie quotidienne. Les augmentations de 
salaires priment sur les améliorations qualitatives de la vie 
quotidienne.
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